Le vitrail a été commandé en 1591 par le Lucernois Peter Emberger (1557-1611) en tant que prévôt du chapitre de la collégiale Saint-Léger de Lucerne, fonction qu’il a occupée de 1589 à 1591 (Brülisauer, 2004). Saint Pierre représenté en conversation avec le Christ ressuscité, illustrant le passage de Jean 21:15-18, fait référence au saint en tant que patron du donateur. Les personnages nimbés représentés dans les écoinçons, dont la lecture est rendue difficile par les plombs de casse, ne sont pas identifiés avec certitude. Alors que Deonna (1926, p. 26) a proposé d’y voir saint Léger, évêque et patron de l’église, lisant et écrivant, la différence des représentations et l’absence d’attributs épiscopaux invitent plutôt à y voir deux autres personnages. Celui de gauche lisant, imberbe et vêtu d’un costume monacal noir et blanc, n’est pas identifié. Celui de droite, portant une longue barbe blanche et un vêtement rouge et blanc, écrivant à côté d’un sablier avec un lion à ses pieds, pourrait être saint Jérôme.
Le peintre verrier n’est pas identifié. Le style du vitrail peut être rapproché des créations de l’entourage du zurichois Christoph Murer (1558-1614), auteur de nombreux cartons qui ont largement circulé dans les ateliers de peintres verriers. A ce jour, aucun carton de sa main représentant cet épisode n’est cependant connu. Plusieurs maîtres étant actifs à la fin du XVIe siècle dans le canton de Lucerne, il pourrait s’agir d’une création issue d’un atelier lucernois. Parmi les maîtres qui ont fréquemment collaboré avec Murer se trouve le Lucernois Franz Fallenter (vers 1550-1612), principalement connu pour avoir réalisé une trentaine de vitraux pour le cloître du monastère cistercien de Rathausen entre 1591 et 1611 (Lehmann, 1941, p. 143-145). Le présent panneau possède aussi quelques similitudes stylistiques (visages allongés, ciels, drapés, etc.) avec les oeuvres de ce cycle daté de la fin du XVIe siècle, telles que la Présentation du Christ au Temple de 1592 (inv. no LM-72203) et la Fuite en Égypte de 1598 (inv. no LM-72204) aujourd’hui conservées au Musée national suisse ou encore Adam et Eve chassés du Paradis daté de 1595 (GE_2128) à l’Ariana. Compte tenu des nombreux plombs de casse, de l’effacement partiel de la peinture et de l’absence d’un panneau similaire attesté de la main de cet exécutant, cette attribution ne peut à ce jour pas être confirmée avec certitude.
Ce panneau, qui accorde une place centrale à la religion (scènes principales et secondaires, citation biblique, représentation du donateur en costume ecclésiastique, etc.), était probablement destiné à orner les baies d’un édifice religieux. Bien que le donateur puisse être rattaché à l’église lucernoise Saint-Léger (Hofkirche), il est peu probable que le panneau se soit trouvé dans cet édifice qui a presque entièrement brûlé en 1633, à l’exception de ses deux tours, et qui a été reconstruit en 1644 (Lischer, 2016). Les autres bâtiments du monastère ayant été moins touchés par les flammes (Lehmann, 1941, p. 129), le vitrail pouvait se trouver dans l’un d’entre eux. En l’absence de plus d’informations, sa localisation d’origine demeure à ce jour inconnue.
Ce panneau a été acheté par la Société Auxiliaire du Musée de Genève à une date inconnue.
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