Nom

Bodjol

Variantes du nom
Grandjean, Walther
Dates de naissance et de décès
Nyon 26.6.1919—13.1.2006 Genève
Auteur·e et date de la notice
Valérie Sauterel 2015; Marlène Baertschi 2023
Lieux avec objets
Données biographiques

Bodjol (1919-2006), de son vrai nom Walther Grandjean, doit son pseudonyme au fait que son frère René utilisait ce terme pour exprimer son enthousiasme dans son enfance, ce qui a valu à ce dernier d’être surnommé Bodjol. Walther, son petit frère, a quant à lui hérité du nom « le petit Bodjol » (Dreyfus, 1993, p. 3).

Bodjol est décorateur, verrier et peintre (Fasel et al., 1984, p.9). Formé aux Beaux-Arts de Lausanne dès 1936, par les professeurs Casimir Reymond et Henri Bischoff, il termine premier de sa volée (Delhoume, 2007, p.20). Il entame en 1940 une profession de décorateur et costumier de théâtre en Suisse et à Paris, et collabore en 1945 avec Alexandre Cingria et Marcel Poncet pour la réalisation de décors. Le théâtre de Poche, la Comédie, le Grand-Théâtre et le Théâtre du Grand-Casino à Genève, ainsi que le Théâtre des Champs-Elysées, le Théâtre Hérberto et le Théâtre Marigny à Paris bénéficient du résultat de cette activité (Delhoume, 2007, p.20). Bodjol exécute aussi des aquarelles, qui témoignent particulièrement de la fraîcheur de sa pratique artistique (Fasel et al., 1984, p.9).

En 1952, âgé de 33 ans, marié et père de famille, l’artiste s’installe à Genève, où il est déjà reconnu pour son activité de décorateur de théâtre. Il exécute dès lors de nombreuses compositions monumentales, incluant des fresques, des mosaïques, des bas-reliefs, des tapisseries en Suisse, en France, en Allemagne et en Italie (Delhoume, 2007, p.21). La première réalisation de l'artiste destinée à être exposée au public est la Mosaïque de la Maternité, datant de 1940, située près de l’entrée de l’hôpital de Nyon (Fasel et al., 1984, p.11).

Une première opportunité d’initier une carrière de peintre-verrier s’offre à lui lorsque la paroisse de Saint-Gervais met au concours trois vitraux pour la chapelle commémorative de l’Escalade en 1953. Bodjol gagne ce concours, malgré la participation de peintres-verriers plus expérimentés (Fasel et al., 1984, p.15). Il réalisera par la suite des vitraux pour 38 temples et chapelle (Delhoume, 2007, p.21).

Bodjol se démarque rapidement lorsqu’il s’initie à la pratique du vitrail en manifestant son indépendance de toute école existante. Il ne se joint pas au mouvement historiciste, ni au Jugenstil, et n’a pas d’attirance envers le thème des métiers (Fasel et al., 1984, p.9). Il privilégie une palette d’opposition entre des bleus prédominants et des variantes de rouges, le tout contenu le plus souvent dans une dynamique verticale, que la grisaille vient affirmer ou nuancer par des tracés (Fasel et al., 1984, p.9).

La pratique artistique de Bodjol ne consiste pas en la volonté d’atteinte d’une beauté héroïque. Il s’intéresse principalement à l’effet des ombres, des matières et des couleurs, qui traduisent des idées véhiculées par le sujet des vitraux (Fasel et al., 1984, p.9). Il ne cherche pas à représenter le réel scrupuleusement. En effet, il tend à se distancer d’une figuration rigoureuse, sans pour autant s’enfermer dans l’art abstrait (Fasel et al., 1984, p.9). Dans certaines œuvres, il s’aventure dans la non-figuration, mais la plupart du temps il réalise des travaux semi abstraits, où les figures sont reconnaissables sans pour autant être traduites littéralement. Au moyen de traits esquissés, il laisse transparaître des formes. Il affirme que le premier message adressé par les vitraux est la lumière, et que le second était auparavant de transmettre une histoire. Or cette mission n'est plus d'actualité selon Bodjol, car une majorité d'individus connaît l'histoire biblique. C'est pour cette raison que l'artiste privilégie l'apport spirituel de la lumière dans ses oeuvres (Delhoume, 2007, p.7).
Bodjol tire aussi parti des rythmes de ses vitraux. Il fait souvent dialoguer une baie verticale scandée par des spirales ascendantes avec un vitrail découpé d’obliques ou de courbes (Pellaton, 2003, p.67).
Les mains des personnages représentés par Bodjol jouent un rôle considérable par leur densité. L'artiste souligne plus intensément les gestes que les visages, car ils permettent d'identifier l'activité d'une figure, que le visage ne définit pas. Il décline la position des mains : ouvertes, en posture d'oraison, désignant quelqu'un ou quelque chose, meurtries, bénissantes. (Pellaton, 2003, p.67).

La dalle de verre est un médium adéquat pour son travail qui adopte souvent des formats monumentaux (Fasel et al., 1984, p.9). Il l'emploie pour la première fois en 1958 pour orner les murs de la Chapelle des Arts, aux Acacias (GE), en justifiant ce choix par la solidité de cette technique de soudure des fragments de dalle de verre par le béton (Delhoume, 2007, p.6). Cette technique requiert un dessin plus élémentaire que les vitraux traditionnels de verre à l'antique serti dans le réseau délié de plombs. Par conséquent, l'artiste opte pour des compositions non figuratives, pour la première fois de sa carrière de maître-verrier (Collet, 1984, p.5).

Les treize vitraux de l'église de Saint-Germain constituent la commande la plus importante faite à l'artiste, en 1968. Ce cycle de vitraux porte sur des thèmes bibliques, comme la Révélation de Dieu à Moïse, les grands événements de la vie de Jésus et les évangélistes. Les sujets sont imposés à l'artiste par la paroisse, qui le contraint à produire des compositions figuratives et accessibles, mais il reste fidèle à son style. Ses figures énigmatiques présentent des visages à peine esquissés, tandis que les mains longilignes captent l'expression. (Breitmeyer et Wyler-Bertini, 1990, p.27)

A la fin de sa vie, la vision de Bodjol s'affaiblit, il adapte par conséquent sa peinture, en appuyant les contrastes d'une valeur à l'autre, et il affirme que la couleur a été sa fascination principale au cours de sa carrière artistique (Delhoume, 2007, p.6).

Bibliographie

Collet, J.-C. (1984). Bodjol à Montherod. Le jura vaudois, Feuille d’avis du district d’Aubonne, 101(3), 5. https://scriptorium.bcu-lausanne.ch/zoom/396662/view?page=1&p=separate&search=église%20Saint-Germain%20genève%20vitraux&hlid=385796383&tool=search&view=1992,0,2606,2047

Delhoume, O. (2007). Bodjol. "Le Chemin de Lumière". Entretien avec un artiste-peintre et peintre-verrier. Galerie Horizon – Hermance (Suisse).

Dreyfus, M. (1993). Être Nyonnais, oui ; mais à Genève. Le Quotidien de la Côte, (32), 3. https://scriptorium.bcu-lausanne.ch/zoom/404353/view?page=3&p=separate&search=bodjol%20Céligny&hlid=404685731&tool=search&view=1282,3320,1800,1057

Fasel, P., Jacques, W., Pittier, J.-M., Collet, J.-C. (1984). Bodjol, peintre et verrier. Editions Sidrine XXIIIe Siècle.

Pellaton, J.-P. (dir.). (2003). Vitraux du Jura (5e éd.). Editions Pro Jura.