Ce vitrail forme un ensemble avec six autres verrières médiévales (plus ou moins fragmentaires) connues, provenant des baies de du choeur de la cathédrale Saint-Pierre de Genève. Éclairée par vingt-trois fenêtres réparties sur trois niveaux, l'abside prend la forme d’un polygone à sept pans.
Le programme iconographique des verrières du chœur, qui se prolongeait peut-être par des peintures, n’est pas connu (Lapaire, 2008, p. 14). Les vitrages qui sont parvenus jusqu’à nous possèdent une composition similaire courante dans l'art verrier dès le début du XVe siècle, avec un saint personnage figuré en pied au centre d’un baldaquin gothique richement décoré, présenté au-dessus des armoiries du donateur. Si les six vitraux de l’abside présentent une apparente unité de composition, ils se distinguent les uns des autres d’un point de vue stylistique. Cela est particulièrement visible dans les dais : celui de Pierre (GE_2014) avec ses solides formes géométriques évoque le gothique flamboyant du milieu du XVe siècle, ceux de Paul (GE_2015) et André (GE_2016) suggèrent par leur architecture plus légère et régulière une exécution de quelques années postérieure au premier, ceux de Jacques (GE_2012), Jean (GE_2013) et Michel (GE_2049) voient leur architecture s’animer grâce aux formes ornementales presque végétales des pinacles, ainsi qu’à la présence d’oiseaux et de scènes secondaires, tandis que celui de Marie-Madeleine (GE_2017), typique de la fin du XVe siècle, reprend de manière plus fantaisiste les formes des premiers panneaux (Aballéa, 2020, p. 46-52). Ces différences s’expliquent en partie par la durée du chantier des vitraux, qui s’est déroulé selon Aballéa (2020, p. 46) en deux campagnes distinctes, vers 1460-1470, puis entre 1487 et 1500.
La commande des vitraux s’est ainsi déroulée de manière progressive au cours de la seconde moitié du XVe siècle, au gré des donations effectuées par le chapitre et les chanoines (Aballéa, 2010, p. 404). Selon Schätti (2013, p. 164-165), le choix des saints résulte probablement des exigences des différents commanditaires. La partie basse de la verrière de saint Paul, qui était à l’origine probablement ornée des armoiries du commanditaire, n’a pas été conservée. Cette donation n’étant pas documentée dans les archives du chapitre cathédral, le donateur demeure à ce jour inconnu.
Les verrières du chœur semblent avoir été réalisées à Genève, par différents peintres verriers renommés, établis dans la cité. Selon Aballéa (2020, p. 56), leur style est particulièrement révélateur des particularités du contexte artistique du XVe siècle à Genève, qui présente un enchevêtrement de traditions, allant du gothique international aux formes flamandes amenées par le retable de Konrad Witz, en passant par des influences françaises. Plusieurs « maîtres des vitraux de la cathédrale » ont été désignés par le chapitre pour assurer le bon entretien des verrières de Saint-Pierre. Cette fonction a successivement été occupée de 1419 à 1467 par le maître verrier genevois Janin Loysel, puis par son fils Mermet, remplacé en 1475 par Hans Witz, avant de revenir de 1485 à 1515 au moins (?) à Etienne Fabri, dit Marlioz (Aballéa, 2020, p. 53).
Le vitrail de Paul a été fortement restauré au fil des siècles et comporte de nombreux compléments et lacunes, parmi lesquels une partie du dais. Cependant, au vu des similitudes entre le sommet des verrières de saints Paul et André, il est probable qu’elles soient issues d’un même atelier (Aballéa, 2020, p. 48). Le vitrail d’André étant attribué pour des raisons stylistiques au peintre et verrier Antoine de Lonhy, il est possible que le présent vitrail ait également été exécuté dans l’atelier de ce maître.
La commande des vitraux prend place à la suite de deux incidents survenus entre 1430 et 1441 qui ont fortement endommagé la cathédrale Saint-Pierre de Genève. Le chapitre entreprend dès 1437-1438 un vaste chantier de rénovation, soutenu par le pape Félix V, ancien duc Amédée de Savoie élu en 1439 (Schätti, 2013, p. 152). Le début de la campagne intérieure, vouée à l’embellissement de l’abside, est marqué par la réalisation du retable peint en 1444 par Konrad Witz et se poursuit entre 1450 et 1500 par la commande de vingt-trois verrières, placées au-dessus du retable (Schätti, 2013, p. 154). La disposition d’origine des vitraux ne peut pas être reconstituée avec certitude, car vers 1540-1545, les verrières subsistantes de la cathédrale ont probablement été remontées dans les fenêtres basses de l’abside pour correspondre à la nouvelle liturgie. Cet agencement est attesté au XVIIIe siècle, sans preuve de changement avant leur dépose en 1888 (Lapaire, 2008, p. 14).
Les vitrages ont été conservés après la Réforme, peut-être pour des raisons économiques (Deonna, 1925, p. 320 ; Aballéa, 2010, p. 404). Au fil des siècles, les vitraux ont été fortement endommagés, voire presque entièrement détruits pour celui de Michel, et restaurés à l’aide de compléments plus ou moins hétérogènes. De ce fait, il a été décidé en 1885 de les déposer et de les remplacer par des copies exécutées par l'atelier de Friedrich Berbig de Zurich entre 1886 et 1894 (Mayor, 1892, p. 53). Ceux-ci sont toujours en place dans le chœur aujourd’hui (cf. GE_17.13). L'artiste a reconstitué certaines des parties manquantes, notamment des soubassements armoriés, ce qui explique que les commanditaires soient parfois différents sur les copies (cf. Deonna, 1925, p. 334).
A l’exception du sommet de la lancette de Michel qui a été achetée dans une collection particulière en 1944, les verrières médiévales ont été remises en 1887 à la Ville de Genève, puis entreposées en 1888 au Musée archéologique de Genève, avant de rejoindre en le Musée d’art et d’histoire (MAH) de Genève à son ouverture (Aballéa, 2020, p. 45, note 14). Afin de pouvoir être exposés, les vitraux les mieux conservés, ceux de Jacques et Jean, ont été restaurés entre 1907 et 1909 par l’atelier fribourgeois Kirsch & Fleckner, suivis vers 1923-1924 des quatre autres vitrages par le verrier genevois Jacques Wasem. En 1980, les verrières ont été nettoyées et regroupées dans une salle du parcours permanent du MAH, dans leur disposition actuelle.
Cité dans :
Rigaud & Hébert, 1845, p. 24.
1891, p. 51.
Deonna, 1925, p. 325, n° 5, fig. 8-10.
Deonna, 1942, p. 214.
Deonna, 1951, p. 102.
Beer, 1965, p. 239-240, pl. 187.
Gagnebin, 1976, p. xxxv-xxxviii.
Lapaire, 1989.
Lapaire, 2008, p. 36, fig. 6 et 44.
Elsig & Schätti, 2013, p. 185-186, fig. 175.
Aballéa, 2020, p. 49, fig. 9.